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Le Millième Pin

Le Millième Pin

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Chapitre 7

​Quittant des yeux mon père, j’aperçois les Devaux et leur avocat qui s’approchent eux aussi du président. Pas de témoin, simplement celui que je comprends être un médecin expert, certainement là pour présenter les résultats des analyses toxicologiques. Cette absence n’est a priori pas une surprise, quand on considère que l’accident a eu lieu sur une route parfaitement déserte. Mon père étant resté plus que discret, je n’ai pas pu suivre grand-chose de l’instruction, mais j’ai au moins compris qu’il n’y avait pas eu de grande révélation. Tant mieux si on en croit l’avocate, qui n’a eu de cesse de répéter à mon père que le doute devrait lui profiter. Du point de vue d’un innocent, j’ai toujours trouvé cela tout à fait insuffisant. Mais à cette heure, je suis sûre que nous nous en contenterions amplement.
Tandis qu’Étienne Devaux et son avocat partent s’asseoir sur le banc le plus proche du Procureur, mon père est invité à s’approcher de la barre. Je ne sais pas si c’est moi qui y vois de plus en plus mal, mais je le trouve ridiculement petit, planté au milieu de tout ce décorum. Le président doit lui aussi avoir un doute sur son identité, car il commence par vérifier celle-ci à haute voix, date de naissance et patronyme des parents à l’appui. À l’énoncé du nom de sa sœur, les mains de Tatie Milie, posées bien comme il faut sur ses genoux, se crispent et agrippent le tissu de sa robe d’enterrement. J’espère qu’elle n’avait pas fait à sa cadette de promesse intenable sur son lit de mort, genre « tout y ira bien, je te le jure », parce que là c’est vraiment mal parti.
En tout cas, Tatie Milie n’a pas ouvert la bouche depuis que nous sommes entrés dans la salle, ce qui est déjà un sacré exploit. Comme on s’apprête à entrer dans le vif du sujet, je sens sa respiration s’accélérer et se faire plus bruyante. Parce qu’il est hors de question qu’elle nous fasse une syncope et que nous manquions le moment que nous attendons depuis des mois, je pose ma main sur la sienne et nous restons toutes les deux suspendues aux lèvres du président, qui commence à interroger mon père.

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