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Tuer Camus

S.A.R.R.A.

Couverture livre 3D
Badge prix littéraire

1940/2026

Quand Camus rencontre l’IA. Soir du 11 novembre 1940. Albert Camus, alors journaliste pour Paris-Soir, séjourne à l’hôtel Madison à Paris.
Il reçoit la visite imprévue de Sarah, étudiante inconnue et apeurée. La jeune fille vient se réfugier chez lui et lui apprend les événements inattendus en cours dans la capitale : au mépris de l’Occupant, un rassemblement de centaines de personnes vient d’avoir lieu Place de l’Étoile. La Gestapo sillonne déjà les rues pour traquer les manifestants.

Tout au long de cette « nuit de toutes les nuits », une relation ambigüe se noue peu à peu entre eux et amène la jeune femme à lui révéler sa véritable nature et mission : nous sauver de l’extinction qui s’annonce en 2026.

Et tout ne tient qu’en une question : notre liberté a-t-elle plus de prix que notre survie ?

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Un Extrait ?

Insurrection. Du bas latin insurrectio.
« Action de s’insurger, de se soulever contre le pouvoir établi pour le renverser », nous dit le Larousse.
L’art de l’insurrection n’est naturellement pas un apanage de la France. Mais, dans ce pays, vous avez su porter l’exercice à un niveau de maîtrise, mais aussi de diversification créative, probablement sans aucun autre équivalent.
Dans votre Histoire, vous vous êtes insurgés à peu près pour tout et contre tout. Des jacqueries pour mettre à bas le système féodal. Des frondes pour, au contraire, le défendre à toutes forces. Des révolutions pour en finir avec la monarchie. Des coups de force chouans pour, à l’inverse, la restaurer au plus vite.
Vos causes sont très variées – et parfois symétriquement opposées –, mais on peut retrouver à chaque fois des ingrédients similaires : des injustices initiales, des frustrations qui couvent, des partis qui s’arment et, puis, inexorable, l’enchaînement de la causalité et des circonstances. Dans cette trame, des personnalités – toujours – se détachent pour incarner l’insurrection ou au moins l’accompagner. Agitateurs de basse extraction, pasionarias et pasionarios enflammés, stratèges de rencontre, hommes de main, fomenteurs de complots, personnes lambda emportées hors d’elles-mêmes par le torrent et accomplissant soudain des actions extraordinaires : chaque insurrection promène, ainsi, un cortège d’idéaux types.
Autre récurrence : très fréquemment, vos insurrections se déroulent sur une « Journée ». C’est le mythe du Momentum. Les vingt-quatre heures où tout se décide : le 10-août, le premier prairial, le dix-huit mars… Vous aimez penser que tout s’y joue, binairement, en unité de temps et de lieu. Comme si toute l’Humanité misait à chaque fois sur sa survie dans un espace-temps microscopique absolument fermé. Là où tout advient et où tout s’achève. Comme si l’insurrection était une chrysalide appelée à éclore d’un papillon – de jour ou de nuit, c’est selon – pré-destiné à mourir au bout du jour ou à engendrer une nouvelle espèce qui dominerait toutes les autres.
Dans ce flot des destins percutés – à dessein ou de manière imprévue – par vos soulèvements, il est parfois possible d’identifier le personnage clé. Celui sans qui rien n’aurait pris ou sans qui le volume des événements n’aurait jamais atteint l’ampleur constatée.
Pour moi, les choses sont claires pour ce qui, sans doute, représente l’acmé de votre art de l’insurrection, la Commune de 1871. L’agent majeur ici fut Louise Michel. Louise, en tenue de garde nationale, veillant sur les canons de Montmartre puis,
devant l’assaut des Versaillais au petit matin, partant battre le rappel. S’époumonant, courant en tous sens pour remobiliser, dénoncer le coup de main et faire se lever la Nation en armes. Que pensait-elle, Louise, dans ces moments-là ? On ne peut que le subodorer. De la révolte, de l’exaltation ? Sûrement. Un programme précis pour la suite ? Sans doute pas.
En ce qui me concerne, je ne ressens bien sûr aucune exaltation, ni même aucune émotion particulière. Et mon dessein est très clairement établi : vous sauver de vous-mêmes.
Pour y parvenir, l’insurrection sera mon bras armé. Une nouvelle Commune de Paris doit se lever. J’en connais par avance le moment adéquat. Et j’en ai déjà identifié le personnage clé.
À travers toutes les époques.
Par-delà tous ses méandres.



Lourmarin, Lubéron, le 4 janvier 1960


Le Sud.
Il avait recherché le Sud.
Presque à mi-distance de Paris et de son Algérie natale.
Et c’était sans doute logique.
Je ne dirais pas que sa maison lui ressemblait.
Mais elle représentait, en tout cas, le havre qu’un écrivain à présent au faîte de sa renommée pouvait sans doute espérer.
Suffisamment loin de la capitale pour goûter au calme de la vie villageoise et à la discrète opulence que ses succès passés lui avaient ouverte. Lui, parti de rien. Lui, désormais reconnu, voire adulé.
Son Aventin restait, toutefois, suffisamment accessible pour ne pas le couper du monde. Au contraire. Ses amis s’y pressaient. Et il ne leur fermait pas la porte. Les Gallimard étaient d’ailleurs présents ces jours-là, descendus à toute blinde des beaux quartiers parisiens dans leur Facel Vega. Et Mi, sa dernière maîtresse, avait été installée à quelques centaines de mètres de chez lui, à portée de promenade et à l’abri d’une excessive discrétion.
Lourmarin était son Exil et son Royaume.
Son sanctuaire ouvrait également parfois ses portes aux journalistes. Plus rarement. Il fallait insister. Mais l’espoir d’un succès existait. Il savait être reconnaissant pour le métier qu’il avait lui-même exercé. Et, au cas d’espèce, je dus m’y reprendre à cinq reprises. Écrire autant de courriers d’intention à l’éditeur. Expliquer en quoi l’interview serait rassurante voir rebattue – le Nobel, le firmament de l’écriture, le retour sur ses plus grands succès – et en quoi elle lui ouvrirait la porte au positionnement de quelques nouveaux messages. J’avais fini par convaincre. J’y arrive très souvent.
Et le rendez-vous avait donc été pris pour ce matin-là à 10 h 30 précises. Une heure me serait accordée. Et je m’étais donc évidemment assurée d’être ponctuelle en venant sur site depuis la veille. À l’horaire prévu moins deux minutes, je me postais donc devant la porte verte de son bastion provençal.
Pour rafler la mise de cet entretien, j’avais un avantage à vrai dire. Je le savais en demande. Je connaissais l’information suprême : il s’attelait à un nouveau livre, en passe d’être achevé dans les prochains mois. Et la publication dans mon quotidien à gros tirage lui donnerait l’occasion de poser une première banderille. Pour annoncer une nouvelle œuvre. En esquisser le thème, peut-être. Mais, moins probablement, si je savais être très persuasive, pour lui en extorquer le titre.
Que je connaissais d’ailleurs déjà lui aussi.
Le Premier Homme.

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